
Le média qui analyse et présages des mutations de la fabrique de la ville.
Nicolas Soulier, Reconquérir les rues. Exemples à travers le monde, éditions ULMER, 2012, 288 pages.
Passons outre les limites d’une scénographie où l’écrit a trop de place pour éveiller durablement l’intérêt. C’est le propos de l’exposition et la nature des projets présentés qui sont passionnants. Voici pourquoi.
« La ville est un processus lent ».
Ce constat de Guillaume Hébert, Co-fondateur d’Une fabrique de la ville, pourrait être le point de départ de l’exposition « Re-Architecture ». Si transformer l'espace urbain requiert du temps, beaucoup de temps, les 15 équipes réunies au Pavillon de l’Arsenal suggèrent comment occuper l'espace dans ce long intervalle où se fabriquent les ZAC et autres projets d'aménagement.
A la ville « conçue » et planifiée des politiques d’urbanisme, le collectif ETC, le Bruit du frigo, les Berlinois de Raumlabor ou ZUS (zones urbaines sensibles) opposent en effet une ville vécue. L’espace dans lequel s’inscrivent leurs projets est déjà là : ce sont les friches, les délaissés, le « tiers-paysage » (Gilles Clément) et ce que le collectif Stalker nommait d’après Michel Foucault les « territoires actuels ». Soit « le négatif de la ville bâtie, les aires interstitielles et marginales, les espaces abandonnés ou en voie de transformation. » Lorsqu’Assemble transforme une ancienne station service en cinéma, que l’Agence d’Architecture Autogérée (AAA) investit un terrain vague dans le 20e arrondissement de Paris ou que l’agence 1024 érige un restaurant temporaire sur ce vieux serpent de mer qu’est l’île Seguin, ils soulignent le potentiel de ces espaces en transition. C’est pourquoi Thierry Paquot, autre « témoin » convoqué sous forme de vidéo à l’exposition, parle à leur endroit d’architecture réactive : s’ils partagent l’ambition transformatrice des projets d’aménagement urbain, les 15 équipes de « Re-architecture » s’en distinguent en effet par leur capacité à agir vite.
Cette réactivité tient d’abord à leur manière d’envisager l’architecture. Pour beaucoup d’entre eux, les collectifs et agences réunies au Pavillon de l’Arsenal se placent, consciemment ou non, dans la lignée de Hakim Bey et ses zones d’autonomie temporaire. Proches à des degrés divers de la pensée autonome, ils penchent pour les constructions éphémères, la micro-architecture et toutes les interventions qui offrent de conjuguer vitesse d'exécution et économie de moyens.
S’il y a quelque chose de la guérilla dans leurs tactiques d’infiltration et dans leurs modes constructifs, on aurait pourtant tort de voir dans cette jeune garde une fronde contre la planification urbaine à la papa. Souvent conduites sous la houlette des municipalités ou des institutions, leurs interventions se forgent en complémentarité avec l’aménagement classique. Elles sont une manière de « meubler » l’intervalle qui sépare la conception d'une zone d'aménagement de sa réalisation et d’amorcer une dynamique de projet dont les planificateurs sauront au besoin tirer profit.
A rebours d’un urbanisme « copier-coller » (la formule est de Cantal-Dupart) qui propose de répliquer, au sein de territoires et d’aires culturelles distinctes, les mêmes centres commerciaux, les mêmes tours de bureaux et les mêmes immeubles, les projets de "Re-architecture" s’appuient sur leur contexte – à commencer par leur contexte humain.
Pour eux, faire la ville revient d’abord à poser la question de l’espace public et de la manière dont il peut être « humanisé », sinon réenchanté. Des jardins de Coloco aux aménagements urbains de Exyzt, les démarches présentées au Pavillon de l’Arsenal sont pour l’essentiel collectives et participatives. Non seulement elles privilégient la concertation et la collaboration avec les habitants, mais elles se déploient dans un champ hybride entre architecture, art, graphisme ou paysagisme et revendiquent leur transdisciplinarité. A rebours d’un urbanisme perçu dans la lignée des Situationnistes comme une technique de la séparation, elles affirment que l’architecture est d’abord une activité sociale dont le but est de relier les citadins. Aussi l’immense majorité des projets présentés dans « Re-architecture » sont-ils des équipements culturels, destinés aux loisirs et aux rencontres.
Cette capacité à mobiliser le public et à transformer rapidement l'espace urbain n'est pas étrangère à l’enthousiasme que suscitent les 15 équipes chez les témoins sollicités pour commenter leur travail : « C’est faire de l’urbanisme autrement, dixit Michel Cantal-Dupart dans un entretien diffusé au Pavillon de l’Arsenal. C’est immédiat, ça gagne du temps, ça vient récupérer des terrains en friche, des terrains en déshérence, et je trouve dommage qu’on limite leurs capacités inventives à ce genre de choses. Ils sont vraiment faits pour réaménager des grandes places emblématiques, qui aujourd’hui nous ennuient dans leur minéralité faite de pétrole et de bagnoles. »
Légère par les matériaux utilisés et par son empreinte environnementale, la maison en kit s'affiche comme un laboratoire de recherche et comme une alternative à la maison dite de « maçon ».
Simple à assembler, modulable et moins chère qu’une maison de maçon, la maison en kit a le vent en poupe. Définie par Claude Vergnot-Kriegel,Carine Merlino et Étienne Delprat, auteurs d’un ouvrage sur le sujet (Éditions alternatives, 2011), comme « une habitation érigée rapidement, avec un nombre limité d’éléments préfabriqués », elle bénéficie en effet d’un contexte où se conjuguent crise du logement et flambée des coûts de construction.
Avant même le relatif succès commercial de la maison en kit dessinée par Starck en 1994 pour le catalogue des 3 Suisses, le kit avait trouvé des formulations diverses dans l’architecture du 20e siècle. Comme l’expliquent les auteurs de « Maisons en kit » , « les architectes des premières maisons en kit sont ceux du mouvement moderne. Si Frank Lloyd Wright, Le Corbusier, Prouvé, les Smithson, les Eames, ont œuvré pour développer des habitats préfabriqués, c’est parce qu’ils y voyaient l’opportunité de répondre à la crise du logement. Ils cherchaient absolument à innover et croyaient en un futur différent, ainsi qu’à d’autres modes de vie. » Avec l'arrivée des congés en 1936, les premières maisons en kit se développent en France, apparaissant comme idéales pour une maison de loisirs tout en permettant une plus grande créativité formelle. Qu’il s’agisse de prototypes ou de projets commercialisés, le dénominateur commun à la multitude de déclinaisons du kit est de proposer des réalisations à de petites échelles, offrant une simplicité des assemblages à un coût intéressant. De plus, le kit s'affiche comme une réponse « aux préoccupations actuelles en matière de société et d'environnement. »
Premier argument en faveur de la maison en kit : son empreinte écologique, supposée plus légère que celle de l’habitat classique. Ainsi, de nombreux projets contemporains de maisons en kit ont une approche environnementale forte, que ce soit grâce au choix des matériaux ou à l'emploi d'énergies renouvelables. Pour les auteurs de « Maisons en kit », elle est « par nature une maison écologique. Elle permet (...) le stockage de CO2 si elle est en bois, la réduction du transport des matériaux pour sa réalisation, des agrandissements aisés avec un impact minimum sur l’environnement… ».
Le projet « Infiniski manifesto house » au Chili des architectes James&Nau en est un bel exemple. Constituée de 2 containers, la maison est construite à 85 % à partir de matériaux recyclés (cellulose, liège, aluminium…) et dispose d'une autonomie énergétique de 70 %, le tout en réalisant 20% d'économies par rapport à une maison « traditionnelle ». Dans la même veine, le concepteur de l'éco-quartier britannique BedZed , Bill Dunster a élaboré la maison ruralZED, une maison en kit évolutive comprenant de nombreuses options de production énergétique allant jusqu’au zéro carbone.
Au-delà de ses performances environnementales, l’une des principales forces de ce projet, est d'offrir des options personnalisables, de sorte que la maison peut s'adapter à l'architecture vernaculaire et aux différentes réglementations et plans locaux d'urbanisme. Une façon d’écarter l’un des dangers potentiels de la construction en kit : l’uniformisation. En effet, parce qu’elle consiste à assembler des éléments préfabriqués, celle-ci est presque exclusivement orchestrée par de grands groupes industriels qui mettent à mal la créativité purement formelle des projets. A se demander si le kit peut se développer sans pour autant être synonyme de standardisation ?
Conscient du danger, Ikea a conçu il y a quelques années une maison en kit entièrement personnalisable : Boklok. Développée en concertation avec Skanska, l’un des principaux acteurs du BTP scandinave, celle-ci se positionne comme « la norme à faible coût de la construction résidentielle » et se commercialise en Finlande, Suède, Norvège, Danemark, Allemagne et en Grande-Bretagne. Cette formule de maison clé en main peine à traverser les frontières françaises et le concept DEARS de Philippe Starck, dont le lancement est prévu pour l’automne, semble voué à faire cavalier seul.
Comme le soulignent très justement les auteurs de « Les Maisons en kit », « puisque la maison en kit comme objet commercialisé est aujourd’hui à la portée exclusive de groupes industriels, il faudra attendre que ces firmes s’intéressent davantage au secteur de la construction de logement préfabriqué. Il faudra probablement assouplir les réglementations commerciales et techniques françaises et européennes, pour permettre à de petites sociétés de commercialiser des kits habitables, enrichissant ainsi l’offre et la possibilité d’autoconstruction totale ou partielle. En attendant, les seules propositions de maisons contemporaines sont celles des industriels ou des équipes de conception-construction, pour des lotissements urbains à grande échelle.» Pour Etienne Delprat, l'auto-construction et la dimension « Do It Yourself » du kit est fondamentale : « c'est une démarche qui permet l'appropriation, explique-t-il. L'autoconstruction est-elle réaliste à l'échelle d'une maison? Oui, dans une certaine mesure. Il y a des projets où avec une vingtaine de personnes tu peux réussir à construire ta maison ».
Mais s’il est encore peu développé dans l’habitat, le kit a su trouver des concrétisations intéressantes en matière d'architecture d'urgence. Exemple : la Paper Log House de Shigeru Ban. A partir de papier recyclé, l'architecte a construit une trentaine d'exemplaires de sa maison de fortune qui a servi d'abri aux sinistrés du séisme de Kobe en 1995. Logique : modulable, transportable, adaptable et pas cher, le kit offre une réponse idéale aux situations d’urgence. C’est pourquoi il pose en filigrane la question de la mobilité, voire de l'immobilité. Si son développement récent semble un effet de notre société « nomade » et vouée à la vitesse, il existe encore peu des maisons en kit mobiles. Pourquoi une telle absence de prise en compte de la mobilité dans les projets actuels ? « Peut-être cela traduit-il un besoin de se ré-ancrer sur un territoire ? », s'interroge Étienne Delprat.
"Ils sont absurdes par ce qu’ils cherchent, ils sont grands par ce qu’ils trouvent" disait Paul Valéry. Aujourd’hui, les cabinets d’architectes mettent en œuvre les idées "absurdes" qu’ils trouvaient il y a quelques années. Ces projets présentés au début des années 2000 alors que l’écologie devenait progressivement une préoccupation internationale sont aujourd’hui passés de l’écran d’ordinateur au chantier de construction. Et chacun intègre désormais une dimension écologique de plus ou moins grande valeur. Peut-on pour autant parler d’architecture durable pour ces tours de plusieurs centaines de mètres de haut ? Difficile de donner une réponse définitive tant le concept même d’architecture durable est compliqué à définir.
"L’architecture durable, c’est avant tout une qualité d’usage. Il faut respecter le site dans lequel s’inscrit le projet et choisir des matériaux durables" nous expliquait récemment l’architecte Edouard François. Si ces principes peuvent aisément s’appliquer à des structures de taille standard, ils sont plus difficiles à respecter quand l’équilibre visuel d’une ville est cassé par l’apparition d’une tour surdimensionnée. Dans une mégalopole comme New York, de nombreux buildings sont en passe d’être centenaires. Ces superstructures énergétivores sont un fardeau quand il s’agit de les mettre aux normes environnementales actuelles. Le demi-milliard de dollars investi dans l’Empire State Building pour en faire un gratte-ciel un peu plus vert en est la preuve évidente. Dès lors, il faut compter sur les tours actuellement en construction pour éviter de faire de ces buildings de simples phallus se dressant dans le ciel.
En la matière, les projets ne manquent pas et l’actualité architecturale est plutôt chargée ces derniers mois. Hier, l'Etablissement public d'aménagement de la Défense Seine-Arche (Epadesa) a annoncé qu'il approuvait la promesse de vente pour la construction de la tour Phare (300 m, 69 niveaux de bureaux) qui deviendra en 2016 la plus haute de France. Imaginée par l'architecte américain Thom Mayne, celle-ci comportera des éoliennes à son sommet, qui participeront à la fourniture en électricité des bureaux. La façade de la tour sera conçue de manière à assurer une ventilation naturelle, avec à la clé d'importantes économies d'énergie. Problème, aucun chiffre n’est avancé pour le moment quant à l’économie réalisée. La production d’électricité générée par les éoliennes reste également un mystère. La présentation officielle du projet se contente d’évoquer "un jardin métaphorique dans le ciel"…
De nombreux architectes choisissent aujourd’hui de placer des éoliennes sur les tours pour présenter ensuite le projet comme écologiquement responsable. C’est notamment le cas du cabinet JDS Architects, qui a imaginé une tour de 1111 mètres de haut pour la ville chinoise de Shenzhen. Des éoliennes (leur nombre n’est pas précisé) et un système de récupération de l’eau de pluie (idée développée à son paroxysme par des étudiants polonais ici) devant suffire à rendre la structure autonome sur le plan énergétique. Difficile à croire si l’on compare ce projet à la tour Strata à Londres. Là aussi, les architectes ont placé des éoliennes au sommet du bâtiment haut de 148 mètres. Résultat ? Les trois turbines de cinq pâles chacune produisent environ 50 MWh par an. Soit une production qui fournit 8 % seulement de l’énergie consommée par la tour. L’autonomie énergétique est donc loin d’être assurée.
Pourtant, certains gratte-ciel en cours de construction ou déjà érigés méritent amplement le label d’éco-building. Il en existe actuellement une dizaine dans le monde. C’est le cas d’une tour à Dubaï imaginée par l’architecte italien David Fischer et dont nous vous parlions l’année dernière. Contrairement aux projets évoqués précédemment, celle-ci intègre des turbines éoliennes en fibre de carbone dans sa structure. Elles sont en effet installées horizontalement entre les étages et suffisent à produire toute l’énergie dont la tour a besoin. Toujours à Dubaï, La Burj al-Taqa (Tour de l'Énergie) profite d’un nouveau vitrage (60% de chaleur en moins absorbée par le bâtiment), d’ouvertures latérales sur la façade pour une meilleure circulation de l’air et de 15 000 m2 de panneaux solaires disposés sur le toit pour assurer sa production énergétique. La Burj al-Taqa n’aura pas besoin de se raccorder à un réseau électrique extérieur et l’excédent d’énergie produit sera même utilisé afin d'obtenir par électrolyse, de l’hydrogène de l’eau de mer. L’hydrogène, stocké pendant le jour, sera ensuite utilisé pour alimenter le circuit électrique aux heures de nuit.
Enfin en Chine, la Pearl River Tower dominera dès cette année la ville de Guangzhou (Chine). Imaginée par le cabinet d’architecture américain SOM (Skidmore, Owings & Merrill), cette tour haute de 310 mètres est équipée de turbines éoliennes disposées dans les renfoncements de sa structure. Sa façade aérodynamique est orientée en direction des vents dominants et a été conçue pour les accélérer de 50% afin d’améliorer le rendement des éoliennes. La façade du building est recouverte de panneaux photovoltaïques tandis qu’un système innovant de refroidissement assure l’aération et la ventilation des 71 étages de bureaux.
Aujourd’hui, les gratte-ciel entièrement autonomes sur le plan énergétique sont rares mais un élan s’est crée ces dernières années. La plupart des cabinets d’architectes intègrent désormais cette problématique dans leur cahier des charges. Reste à convaincre les professionnels du secteur de la construction. Ces derniers surestiment souvent les coûts liés à la construction de bâtiments respectueux de l’environnement. Ainsi, selon une étude publiée par le Conseil Mondial des Entreprises pour le Développement Durable (WBCSD), les professionnels du bâtiment évaluent à 17 % les coûts supplémentaires d'un bâtiment vert par rapport à une construction classique, soit plus de trois fois le surcoût réel estimé par WBCSD à 5 %. Un travail sur les mentalités reste donc à effectuer pour que les projets rêvés d’éco-buildings deviennent réalité dans quelques années et confirment à nouveau la maxime de Paul Valéry.
L’homme s’est fait une place de choix dans le milieu de l’architecture durable jusqu’à se faire appeler le « géant vert ». Une caricature dont Edouard François essaye de s’affranchir en se concentrant sur ce qu’il envisage comme le cœur de son métier : l’inscription dans le contexte architectural, l’humain et les usages. Rencontre.
Qu’il travaille sur une tour dans le quartier Massena, un lotissement de logements sociaux dans le 20e arrondissement de Paris ou sur la façade de l’hôtel Fouquet’s Barrière sur les Champs Elysées, le travail d’Edouard François part toujours du contexte et propose une architecture qui respecte les paysages, quels qu’ils soient. « Je travaille principalement sur des problématiques contextuelles, explique l’architecte. Par exemple, j’ai travaillé sur le projet Eden Bio en même temps que le Fouquet’s et on peut voir deux positions extrêmes. D’un côté, c’est une position sur une façade d’un quartier chic et d’un autre, il s’agit d’une position sur une intériorité, un cadre de vie. Faire du durable pour moi, c’est proposer un projet spécifique à un site donné. On ne peut pas coller la même tour ici et là. » Cette manière d’approcher l’architecture « durable » est un peu la marque de fabrique d’Edouard François, sa signature.
Mûrie peu à peu depuis 1998, année où il crée sa propre agence d’architecture après s’être associé à François Roche de 1990 à 1993 et à Duncan Lewis de 1994 à 1997, elle se pose en préalable à chaque projet, et constitue sa façon d’aborder l’environnement « sans le confondre avec des problématiques techniques qui n’ont pas grand intérêt, que tout le monde sait faire et que tout le monde est obligé de faire. »
Autre marotte de l’architecte : l’utilisation du végétal. En témoignent la façade végétale des Gîtes Ruraux, à Jupilles ; l’Immeuble qui pousse à Montpellier, Tower Flower ou l’immeuble aux bambous. Pourtant, à mesure que s’est généralisé l’engouement pour les murs végétaux et autres manières de « verdir » à bon compte un bâtiment, Edouard François est devenu sur ce point plus parcimonieux : « Le vert comme « nature » va devenir emblématique du développement durable et cet emblème commence à être utilisé à tort et à travers. J’ai commencé cette approche de façon contextuelle, je trouvais intéressant d’opposer à un parc une façade végétale car cela apporte du sens. Pour le Fouquet’s, on m’a demandé une façade végétale, j’ai dit non, car cela n’avait pas de raison d’être. Le végétal, c’est une réponse à des problématiques contextuelles mais aussi de densification, de saisonnalité ».
Ainsi, pour ne pas être prisonnier de son étiquette de « géant vert », l’homme qui affirme « avoir inventé le genre arbre dans l’architecture », essaie de ne pas prendre le végétal pour point de départ de son travail et de le convoquer seulement si nécessaire, comme avec le projet de tour dans le quartier Massena à Paris :
« Je reviens dans ce projet sur l’idée de végétal, positionné en hauteur, pour donner l’effet d’une touche verte comme un gros arbre ou le Mont Valérien. Cela ne déforme pas la ville ».
Construction de 18 logements sociaux HQE à Louviers en Normandie, 30 logements sociaux avec Eden Bio dans le 20e à Paris et actuellement un projet de 114 logements à Champigny sur Seine : l’architecte participe à de nombreux projets en logement social. Condition de sa participation à ce type de projet : « quand on pose une question un peu pointue sur cette question ». Et Edouard François de citer l’une de ses réalisations, en cours à Champigny : « ce projet se situe dans une zone qu’on appelle « déshéritée ». Mon ambition, c’est de réconcilier cette zone. J’aurai gagné si je réussis à en faire un centre ville». Pour ce défi, l’architecte a eu l’idée de rassembler dans un même bâtiment les trois « vocabulaires » architecturaux du site : maisons de ville, pavillons et barres.
Les projets de logements sociaux lui permettent ainsi une créativité architecturale intéressante. Pour le projet Skin Wall à Grenoble (Construction de 68 logements sociaux locatifs et en accession à la propriété financée par l’Union Européenne), il a préféré mettre l’accent sur les problématiques d’hyper isolation et environnementales pour tendre vers des bâtiments à énergie positive. Sa réponse : une enveloppe pensée comme une peau qui enrobe le bâtiment et permet d’éviter les ponts thermiques, doublée d’un travail sur la notion de « mou » et de « dur » en architecture. Pour synthétiser sa position, Edouard François explique :
« Entre deux solutions, je choisis la plus économique et celle qui a le plus d’usage, cela se fait finalement indépendamment de la beauté qui m’intéresse assez peu. ».