
Le média qui analyse et présages des mutations de la fabrique de la ville.
Dépendance à la voiture, étalement urbain, éloignement des zones d’emploi, de commerce et de transport : le mode de vie pavillonnaire est très gourmand en émissions de gaz à effet de serre. C'est la raison pour laquelle les réflexions sur la ville durable prônent de plus en plus un urbanisme qui privilégie la densification de l’habitat. Cette solution permet de répondre à deux problèmes : l’obligation de réduction de CO2 et le besoin de nouveaux logements dans les premières couronnes des agglomérations. Contrairement aux opérations actuelles qui s’installent dans les anciennes friches industrielles, la démarche Bimby s’intéresse aux espaces périurbains où se concentrent les problèmes.« Le manque de terrain à bâtir est une réalité de beaucoup de villes en France. Vendre une partie de son terrain pour faire construire est une solution à la fois économique et écologique », expliquent Benoit Le Foll et David Miet, les deux architectes urbanistes à l’origine de la démarche Bimby en déplacement au CMAV de Toulouse pour présenter leur projet. Les mots de « lutte contre l’étalement urbain », « crise du foncier » sont rapidement évoqués. L’idée principale est simple : dans un contexte où la pression foncière est particulièrement forte dans les quartiers pavillonnaires, la démarche Bimby s’affiche comme un nouveau levier pour renouveler la ville. En effet, elle offre la possibilité à un habitant de céder une partie de son terrain pour créer de nouveaux logements.
Si l’on considère qu'il y a 19 millions de maisons individuelles en France, il suffit qu’un propriétaire sur 100 accepte de vendre une partie de son terrain pour libérer 190.000 terrains à bâtir. Aujourd’hui, c’est une vingtaine de communes, un peu partout en France (Bretagne, Vendée, Aquitaine, Auvergne…) qui ont engagé une démarche pilote d’expérimentation.« On avait le pressentiment que l’on avait la place suffisante pour construire dans l’enveloppe urbaine et j’étais très agacé par la manière dont les agences immobilières découpaient les terrains selon des intérêts individuels, bien que dans le cadre légal du POS (Plan d’occupation des sols). Aussi, le diagnostic du PLU a confirmé le manque de petits logements, petites maisons et petits immeubles collectifs. Bimby s’est alors présentée comme une méthode appropriée pour nos problématiques », explique Jacques Cabot, le maire de Bouray-sur-Jouine. Cette commune (2000 habitants) située dans l’Essonne, à une quarantaine de kilomètres de Paris, connait une très forte pression immobilière et doit faire face à une importante demande de logements.Principale motivation mise en avant par les habitants : l’intérêt financier. « A 150.000 euros la valeur du terrain, de nombreuses personnes voient soudain l’intérêt d’en céder une partie. De plus cela permet de dégager de la trésorerie pour assurer de nouveaux besoins : une maison de plain-pied pour une personne âgée, un logement pour un enfant, le coût de l’entretien du jardin ou tout simplement pour financer des projets personnels », soulignent les porte-parole de Bimby. « Il est important que la commune propose des formes d’habitat qui permettent à nos jeunes et à nos anciens de rester vivre dans notre commune », estime le maire de Bouray-sur-Jouine.
"A 150.000 euros la valeur du terrain, de nombreuses personnes voient soudain l’intérêt d’en céder une partie. De plus cela permet de dégager de la trésorerie pour assurer de nouveaux besoins : une maison de plain-pied pour une personne âgée, un logement pour un enfant, le coût de l’entretien du jardin ou tout simplement pour financer des projets personnels." Benoit Le Foll et David Miet, architectes et urbanistes à l'origine de la démarche Bimby
Autres avantages pointés du doigt : la maîtrise de l’étalement urbain. Le fait de limiter la construction de logements implantés de plus en plus loin des zones d’emplois et de transport influe sur les émissions de gaz à effet de serre et le « grignotage » des terres agricoles. Alors que l’étalement urbain semble inévitable pour construire de nouvelles maisons individuelles, forme d’habitat la plus prisée par les français, Bimby se positionne comme une alternative concrète. « Créer de nouveaux logements dans les tissus existants permet d’offrir la maison individuelle que les habitants sont venus chercher en arrivant dans les zones pavillonnaires. Et pour une municipalité, Bimby permet également de ne pas avoir à construire de nouvelles voiries et de réseaux. Il y a un intérêt convergent entre l’individuel et le collectif dans un contexte de pression foncière » souligne David Miet, qui a depuis crée une société de conseil en urbanisme auprès des collectivités.
Principale difficulté pour cette démarche : les règles d’urbanisme. « Concrètement un habitant qui souhaite vendre une parcelle de son terrain a 4 chance sur 5 d’en être empêché par la réglementation », précise David Miet. Certaines règles du PLU (Plan Local d’Urbanisme) bloquent en effet la mise en place de ce type de projets immobiliers. Par exemple, Bouray-sur-Jouine va modifier son PLU (Plan Local d’Urbanisme) en juillet prochain afin de permettre la construction de nouveaux logements « façon Bimby » avec des premières applications prévues pour début 2014.
"Concrètement un habitant qui souhaite vendre une parcelle de son terrain a 4 chance sur 5 d’en être empêché par la réglementation". David Miet
Tremblay-sur-Mauldre, commune de 1000 habitants située dans les Yvelines, expérimente également la démarche. Le PLU devrait évoluer pour autoriser la construction de 70 logements en 10 ans. Elle a adopté un PADD (Projet d'aménagement et de développement durable) fin 2012 dont l’axe numéro 1 est de promouvoir la démarche de renouvellement initié par Bimby. Pas de clivage politique semble se dessiner parmi les premières municipalités qui ont décidé de tenter l’expérience. « On relève davantage une distinction entre pouvoir centralisé et pouvoir localisé. Cela se joue sur l’initiative laissée par le maire aux habitants », estime l’urbaniste, ajoutant : « Nous avons deux outils pour faire évoluer la situation. Le premier est le PLU qui peut être modifié de façon à autoriser la construction selon certaines règles dans les tissus existants. Le second est un outil de participation des habitants qui permet au propriétaire d’être reçu une heure gratuitement par un architecte pour conseiller et orienter les habitants ».
L’objectif affiché par Bimby est de faire converger intérêt privé et intérêt collectif pour construire un projet urbain. Un positionnement qui inverse le mode de représentation traditionnel de la fabrique de la ville. « Les élus partent habituellement du global au local, avec Bimby, c’est l’inverse, s’amuse Benoit Le Foll. Cela permet de changer la relation démocratique lors de la concertation. Faire une ville plus démocratique, c’est faire une ville plus durable ». Un des changements opérés par cette démarche repose en effet sur le transfert de compétences qui attribue la maitrise d’ouvrage à l’habitant. « La simplification de la démarche constructive permise par Bimby est également plus économique, cela retire de fait la commercialisation, les normes supplémentaires, le coût du bureau d’études et la marge du promoteur. C’est la logique de filière courte dans le logement », continue David Miet.
"La simplification de la démarche constructive permise par Bimby est également plus économique, cela retire de fait la commercialisation, les normes supplémentaires, le coût du bureau d’études et la marge du promoteur. C’est la logique de filière courte dans le logement." David Miet
Une position qui ne suscite pas que des approbations. Certains professionnels du secteur, architectes et urbanistes en tête, s’inquiètent de la dérive possible de cette appropriation de la ville par les habitants eux-mêmes. Leur crainte : la possibilité laissée à de petits propriétaires de fabriquer le territoire. « Il est clair qu’il faut s’assurer de certaines exigences, de se positionner sur les façades et les ouvertures pour que l’espace public soit respecté. Il faut faire du sur mesure, la modification du PLU doit dépendre de la morphologie des villes et du marché immobilier local pour ne pas donner les clés de la ville à de petits spéculateurs immobiliers », souligne David Miet. Il ajoute « Bimby donne un peu plus de pouvoir à l’habitant en en retirant à l’urbaniste. Cela explique sans doute que la principale résistance provient des professionnels du secteur qui voient d’un mauvais œil la perte d’une partie de leurs prérogatives. » Les deux initiateurs de la réflexion Bimby estiment qu’il faudra bien une dizaine d’années pour que la démarche se soit implantée de façon significative sur le territoire.
La politique des écoquartiers a ses crédos. La concertation en est un. « Les écoquartiers innovent dans les méthodes de productions urbaines contemporaines et offrent la possibilité de porter des stratégies exemplaires en matière de concertation. » estime Décider Ensemble. En novembre 2011, cette association dédiée au développement en France de la concertation et de la décision partagée a passé à la moulinette quelques initiatives en France et en Europe dans son rapport « De l'écoquartier à la ville durable, analyse des pratiques de la concertation ». La concertation pour la réalisation de projets y est définie comme « un processus s’appuyant sur un dispositif de dialogue entre le porteur de projet et les parties prenantes et/ou le public, dialogue maintenu dans la continuité et rythmé par des temps forts et aboutissant à une décision motivée en tenant compte des échanges ».
Contrairement à des pays nord-européens comme l’Allemagne ou les Pays-Bas où la dimension militante fut très présente dans la prise de position dans les projets d’aménagement, la France s’est tardivement intéressée à ces pratiques.
Beau programme pour cette notion peu ancrée dans les mentalités des français. En effet, contrairement à des pays nord-européens comme l’Allemagne ou les Pays-Bas où la dimension militante fut très présente dans la prise de position dans les projets d’aménagement, la France s’est tardivement intéressée à ces pratiques. De surcroît, l’impulsion est davantage venue des institutions. En France, les écoquartiers sont avant tout des projets portés par les collectivités locales auxquels vient s’associer par la suite la société civile.
La notion de concertation dans l’urbanisme remonte au début des années 1990 avec notamment la naissance des agendas 21 locaux (et son paragraphe 23.2) lors de la conférence de Rio en 1992 : « l’un des pré-requis fondamentaux pour la réussite du développement durable, affirme le texte, est une large participation publique dans le processus de décision ». Ensuite, la Charte adoptée lors de la conférence européenne d’Aalborg (Danemark) le 27 mai 1994, a formalisé les premiers principes de l’urbanisme durable, dans une optique de transparence et d’association des différents acteurs. La charte de la concertation du MATE (Ministère de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement) en 1996, proposée par Corinne Lepage, promeut la participation et le débat public et insiste sur la concertation dès l'amont des projets. En 2002, la loi relative à la démocratie de proximité donne un cadre à la participation des habitants à la vie locale. Le nouveau label « Ecoquartier » lancé fin 2012 met également en avant cette notion dans les « 20 engagements ». Il invite à « formaliser et mettre en œuvre un processus de pilotage et une gouvernance élargie. » La concertation a ainsi progressivement pris de l’ampleur et révélé ses atouts : sensibiliser les habitants et surtout légitimer l’action publique, pour in fine contribuer à l’amélioration de la démocratie locale. La concertation est désormais présentée comme un préambule à la réussite d’un écoquartier. Toutefois, comme l’estime Christophe Catsaros, rédacteur en chef de la revue d’architecture Tracés : « Les écoquartiers donnent la tonalité. Ils préparent le terrain, mais beaucoup reste à faire encore d’un point de vue juridique, comme faire évoluer le statut de locataire du parc social vers quelque chose d’intermédiaire, de plus actif, ou encore favoriser des coopératives d’habitants. C’est des choses qui sont en route mais restent encore à faire. »
De nouveaux outils numériques sont actuellement expérimentés pour doper la participation des habitants. « Les outils et méthodes de concertation utilisés pour la réalisation des écoquartiers sont encore très conventionnels : réunions publiques, ateliers de travail, visites de sites..., précise l’étude de Décider Ensemble. Si des sites Internet sont créés, ils restent souvent informatifs et les premières tentatives de mise en place d’un dialogue construit et réactif grâce à ces outils restent timides en France ». A cet égard, Rennes Métropole fait figure d’exemple avec son projet de quartier « La Courrouze ». Des ballades numériques ont été organisées pour les futurs habitants. Equipés de tablettes et de systèmes de réalité augmentée, ceux-ci ont pu visualiser en 3D le futur éco-quartier, dont la date de livraison est prévue à l'horizon 2020.
"Les outils et méthodes de concertation utilisés pour la réalisation des écoquartiers sont encore très conventionnels : réunions publiques, ateliers de travail, visites de sites..., précise l’étude de Décider Ensemble. Si des sites Internet sont créés, ils restent souvent informatifs et les premières tentatives de mise en place d’un dialogue construit et réactif grâce à ces outils restent timides en France." Extrait du rapport « De l'écoquartier à la ville durable, analyse des pratiques de la concertation »
Pour Marion Lasfargues, chargée de mission chez Décider Ensemble, « aujourd’hui, la stratégie d’open data n’est pas vraiment maitrisée, certains collectifs de citoyens s’inscrivant en opposition contre les acteurs institutionnels mais l’enjeu est réel et à terme, d’ici 5 à 10 ans, l’open data pourra modifier la concertation en la rendant plus attractive et en améliorant la qualité des projets finaux avec une meilleur prise en compte des usages des habitants eux-mêmes ». Un avis partagé par Christophe Catsaros : « L’open data est certainement un raisonnement qui va dans le bon sens. Il rend plus difficiles certains abus, certains détournement qui ont fait la mauvaise réputation du milieu de la construction. Ce qui est essentiel c’est de développer une culture du déchiffrage des données publiques : les données ont beau être accessibles, si personne ne peut les lire, ça ne fait pas avancer les choses. »
Chez Décider ensemble, on rappelle enfin les particularités de l’implication des citoyens dans tous les types de projets (on parle de concernement). « Les personnes qui participent aux réunions sont toujours ceux qui sont contre. Ce sont en général des hommes, d’un certain âge, diplômés et qui ont du temps », souligne Marion Lasfargues, ajoutant « que les dispositifs en ligne pourraient faire évoluer ce constat ». Pour que la participation habitante soit réellement pertinente, il est en effet indispensable que l’habitant se sente concerné par la démarche. Et c’est là tout le paradoxe des projets d’écoquartiers, et plus globalement des projets d’urbanisme, qui sont élaborés alors même que les habitants ne sont pas encore là…
La concertation la plus vive se manifeste principalement an aval des projets, quand les habitants ont pris place dans les logements, à ce moment même où leur marge de manoeuvre est la plus faible pour infléchir la mise en place de tel service ou tel aménagement.
Ce phénomène pourrait être d’autant plus important que le risque de livrer des écoquartiers clé en main pèse sur le nouveau label français. La concertation la plus vive se manifeste principalement an aval des projets, quand les habitants ont pris place dans les logements, à ce moment même où leur marge de manoeuvre est la plus faible pour infléchir la mise en place de tel service ou tel aménagement… Reste la question de la défiance actuelle des habitants. Souvent, ces derniers n’ont plus confiance envers les institutions et les différents acteurs qui ont longtemps fait rimer concertation avec information. Les modèles d’autopromotion et d’habitat coopératif où les habitants se regroupent pour concevoir et financer leur logement pourraient alors devenir des modèles de concertation intéressants pour construire la ville de demain.Déborah Antoinat
Jean Haëntjens, La ville frugale, un modèle pour préparer l'après-pétrole, éditions FYP, 144 pages.
Comme je l’ai déjà expliqué, j’ai épousé en 1961 une psychologue qui m’a posé cette question : «pourquoi vous, les architectes, ne vous intéressez pas à l’humain ? » J’ai aussi rencontré un client qui voulait construire une zone résidentielle qui serait « bonne pour les gens » et je me suis rendu compte que je ne connaissais rien d’un tel sujet à l’époque, en 1962. Ces événements ont aiguillé mes recherches vers l’interaction des formes architecturales et des hommes.
En 1965, j’ai eu une bourse pour passer un an en Italie à étudier la façon dont les gens utilisaient l’espace public. Plus tard, en 1966, j’ai obtenu un poste de chercheur pour étudier toutes ces questions à l’Ecole d’architecture de Copenhague. C’est durant ces travaux de recherche que j’ai été amené à lire Jacobs pour la première fois, mais j’étais plongé dans le sujet depuis longtemps.
Le modernisme a fait table rase de toutes les traditions et de toutes les expériences antérieures concernant l’habitat humain. L’urbanisme était une nouveauté, la planification et l’architecture aussi. L’environnement construit était sensé fonctionner comme une « machine à habiter ». Les gens et la vie publique étaient complètement négligés.Les Modernistes n’avaient aucune idée de leur impact radical sur la qualité de vie. Dans l’un de mes livres, Life between buildings, j’écris : « si on avait demandé à groupe de professionnels de construire un environnement qui annule toute vie entre les immeubles, ils n’auraient pu le faire aussi efficacement que les Modernistes. »
Le nombre de voitures, leur vitesse et le gigantisme des infrastructures routières ont fait perdre aux gens toute notion d’échelle humaine. L’architecture à 60 km/h est devenue dominante, alors que les villes avaient été façonnées jusque là par une architecture à 5km/h.
Encore une fois, j’insiste sur l’idée que les villes doivent être regardées et planifiées à hauteur d’œil, et non depuis des avions. Les villes anciennes étaient toujours planifiées dans cet ordre : habitants, espace, constructions. Les Modernistes, eux, ont commencé par les constructions, puis l’espace, puis (éventuellement) la vie. Cette méthode de planification étouffe la vie urbaine.
Votre approche est fondée sur l’observation de villes anciennes, comme Venise. Est-il possible d’appréhender l’échelle humaine sans verser dans la nostalgie. En d’autres termes, peut-on être moderne sans être moderniste ?
Absolument. Il y en a beaucoup de très bons exemples contemporains, parmi lesquels les projets d’habitat de Ralph Erskine ou, plus récemment, BO01 à Malmo, en Suède.
Avec mon équipe, nous venons juste de terminer un nouveau livre : How to study Public Life (littéralement : comment étudier la vie publique). Nous y décrivons 50 ans de d’avancées dans l’art d’étudier la relation des hommes à l’espace et montrons comment ces recherches peuvent servir de base à la création de nouveaux quartiers ou à l’amélioration de l’existant. Aujourd’hui nous savons beaucoup de choses quant à l’influence du bâti sur les comportements et modes de vie. Quand Jane Jacobs protestait contre le Modernisme et le Motorisme en 1961, on ignorait tout de tels sujets. La connaissance que nous avons des villes à vivre a été acquise au gré de 50 ans de recherches, le plus souvent grâce à des observations systématiques. Notre prochain livre raconte tout cela.
Planifier la ville en fonction des usagers devrait être la stratégie principale pour créer des villes animées, attentives à la qualité de vie, à la sécurité, la durabilité et la santé. On aborde ces cinq thématiques si l’on s’occupe en toute priorité des habitants.
Comme je l’ai déjà mentionné dans Pour des villes à échelle humaine, les groupements humains étaient modelés traditionnellement sur le corps humain, sur nos mouvements et nos sens.
"Avec le Modernisme et le Motorisme, les planificateurs ont entièrement cessé de prendre en compte l’échelle humaine." Jan Gehl, urbaniste
Avec le Modernisme et le Motorisme, les planificateurs ont entièrement cessé de prendre en compte l’échelle humaine. La confusion des échelles a eu cours pendant de nombreuses années – tout est désormais plus grand et plus rapide, mais la taille de l’homme n’a pas changé pour autant. Quand nous partons en vacances, nous cherchons systématiquement des lieux accordés à l’échelle humaine.
Les villes agréables pour les piétons, où les gens vivent dans les rues et se voient face à face sont une très bonne stratégie. Jane Jacobs a écrit sur “les yeux sur la rue”. Selon moi, c’est toujours de cette manière qu’il faut procéder, autant que possible.
Dans toutes ces villes – et dans bien d’autres – nous avons utilisé les mêmes méthodes : un espace public – une approche de la vie publique. D’abord en étudiant les espaces en eux-mêmes, puis en déterminant quels usages les gens font de ces espaces et enfin, en faisant des recommandations pour améliorer ces espaces et encourager la vie urbaine. En ce moment, je suis en train de travailler avec la ville de Moscou en appliquant les mêmes méthodes, bien que les problèmes de circulation y soient particulièrement compliqués.
Dans Pour des villes à échelle humaine, je montre que depuis pendant 50 ans nous n’avons été régis que par deux modèles de planification : le modernisme et l’invasion routière (motorisme). De toute évidence, nous avons désormais un nouveau paradigme : la volonté de créer des villes agréables à vivre, animées, sûres, durables et saines.
"Densifier sans verser dans la grande hauteur demande plus de travail aux architectes, mais produit de meilleures villes. Pour moi, les tours sont une réponse architecturale paresseuse à la densité." Jan Gehl
Un changement qui va dans le sens d’un plus grand respect des citadins et de la biologie humaine est absolument nécessaire.
Il est tout à fait possible de créer une plus grande densité (et nous avons besoin d’une densité supérieure à celle de la plupart des zones récemment loties) sans pour autant construire des forêts de tours. Barcelone est plus dense que Manhattan. Densifier sans verser dans la grande hauteur demande plus de travail aux architectes, mais produit de meilleures villes. Pour moi, les tours sont une réponse architecturale paresseuse à la densité.
Jean Haëntjens, La ville frugale, un modèle pour préparer l'après-pétrole, éditions FYP, 144 pages.
Jean Haëntjens, La ville frugale, un modèle pour préparer l'après-pétrole, éditions FYP, 144 pages.